#12 Domaines – Pierre Boulez

Si vous avez suivi nos précédents articles, vous vous attendiez peut-être à un autre disque de rock psychédélique, une pépite oubliée du funk. Eh bien, oubliez tout ça. Aujourd’hui, on change de registre. Radicalement. On entre dans le domaine (jeu de mots facile, désolé) de Pierre Boulez, avec son album « Domaines ». Et croyez-moi, c’est une aventure sonore dont on ne revient pas indemne.

Qui est Pierre Boulez, et pourquoi tant de notes ?

Pierre Boulez, c’est un peu le Gandalf de la musique contemporaine, mais en plus abstrait et avec un regard encore plus perçant. Compositeur, chef d’orchestre et théoricien, il a révolutionné la musique du XXe siècle avec son approche sérielle, sa rigueur mathématique et son goût prononcé pour faire grincer les dents de ceux qui aiment les mélodies simples. « Domaines » en est un parfait exemple : un labyrinthe sonore où chaque note semble avoir été posée après un long débat philosophique.

« Domaines », ou comment perdre ses repères en trois mouvements

À l’écoute de cet album, une question s’impose immédiatement : mais où est la mélodie ?! Réponse : nulle part et partout à la fois. Ici, pas de refrain entêtant, pas de groove, pas de solo de guitare à la Santana. Juste un dialogue d’une densité hallucinante entre une clarinette solo et un ensemble instrumental, le tout orchestré avec la précision d’un horloger suisse… sous acide.

Dès les premières secondes, on a l’impression d’être plongé dans une discussion très sérieuse entre extraterrestres super intelligents. Les sons s’éparpillent, se répondent, s’évitent. C’est un chaos maîtrisé, une conversation où chaque note semble remettre en question l’existence même de la précédente.

Une direction au scalpel et une pochette minimaliste

L’album « Domaines » doit aussi beaucoup à Diego Masson, qui dirige l’ensemble Musique Vivante avec une rigueur chirurgicale. Son approche, loin d’être purement technique, donne une intensité presque dramatique à cette œuvre complexe. Il sculpte chaque nuance, chaque micro-interaction entre les instruments, créant une expérience sonore d’une densité rare. L’ensemble Musique Vivante, fondé en 1966, est d’ailleurs un des piliers de la musique contemporaine en France, habitué à naviguer dans les partitions les plus déconcertantes.

Quant à la pochette du vinyle, elle est à l’image de l’œuvre : épurée, presque austère. Pas d’illustration, pas d’artifice, juste du texte sur un fond uni. Un parti pris radical qui annonce la couleur : ici, pas de distraction visuelle, seule la musique compte. Un objet aussi sobre que déroutant, à l’image de son contenu.

Clairement, « Domaines » n’est pas pour tout le monde. Mais c’est justement ce qui fait son charme. Si vous aimez être surpris, si vous avez une curiosité insatiable pour les sons qui sortent des sentiers battus, cet album est une expérience unique.

Pour mon best fan un petit bonus avec un GOAT featuring :

Photo Pierre Boulez devant la caricature d’Igor Stravinski par Jean Cocteau (non daté) © J.-Ph. Charbonnier/Agence TOP

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